lundi 9 août 2010

Tout bon, tout beau, tout blanc.

Décors immaculés, musique de type relaxation de mémé à la gymnastique volontaire du village, optique chargée de différents filtres superbes; Belladonna réalise une œuvre magistrale.
Heavy Petting ou tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les lesbiennes sans jamais oser débander.

Belladonna
Rappelons pour les non-initiés qui est Belladonna.
Née pendant l’année 1981, le 21 mai (date du dernier jour des seigneurs taureaux, puissants, nobles et purs; et veille du début de l’ère des gémeaux, signe homosexuel comme tout scientifique respectable sait), la petite Michelle Anne Sinclair voit le jour dans l’hôpital militaire de la Keesler Air Force basée à Biloxi dans le Mississipi.
Le papa de Michelle est capitaine dans ce corps d’armée et la famille Sinclair profite ainsi des voyages permis par la formidable profession de militaire. La jeune fille découvre la choucroute allemande et ses saucisses, les lacs humides et les rocs dressés de l’Idaho, la fistalité (heu, fiscalité) sympathique du Delaware, avant d’effectuer un bref séjour californien et de se fixer, finalement, dans l’Utah. Ici, elle grandit dans un foyer mormon. Rappelons que cette religion autorisa longtemps le mariage plural c’est-à-dire, la polygamie. L’Utah détenait d’ailleurs un grand nombre de foyers polygames jusqu’à la fin du XIXe siècle lorsque Wilford Woodruff interdit définitivement ces pratiques. Désolation des fidèles considérant que le zizi valait bien une messe.
Puis, Belladonna s’émancipe. Parcours classique cette fois. Beaucoup de striptease avant le coup de fil d’une amie qui lui propose une rencontre avec des contacts pouvant la faire poser dans un magazine. Direction Los Angeles. Elle explique à l’agent ses désirs de ne travailler qu’en solo ou avec des femmes. Mais le grand homme la raisonne en lui expliquant la difficulté de percer dans ces conditions, surtout avec un corps aussi tatoué. Premier contrat enfilé (Real Sex Magazine # 31), Belladonna s’apprête à conquérir le monde.

Paternel militaire + éducation mormone = star du x tatouée et hardcore.
Car personne ne choque mieux qu’un enfant bien élevé. Mais le bambin, même turbulent, recherche souvent la bénédiction familiale. Le succès faciliterait-il le pardon du père?
Peut-être. Mais, réussir dans le porno, c’est pousser loin les limites du corps. Belladonna doit sa réputation à des performances physiques rares. Elle réussit des gorges profondes exceptionnelles, montre une envie de sexe sale et, la peau déjà recouverte de fresques, transforme ses orifices en véritables grottes de Lascaux. Le pardon recherché et qui serait facilité par le succès, nécessite le recours à des moyens extrêmes et plus condamnables encore par les détracteurs du porno. Belladonna se retrouve piégée car, excepté la grande Clara Morgane, on connaît peu de stars du X brillant par leur sagesse.
Pour quand une Belladonna hexagonale? Réponse: on n’a pas tous la chance d’avoir des parents villiéristes.

Tendresse saphique et subversion

Belladonna s’impose très vite comme l’une des spécialistes du film lesbien. Capable d’une élasticité corporelle caoutchoutissime, la Belladonna réalisatrice exige beaucoup des actrices qui l’accompagnent.
Ainsi, dans The ConnASSeur tourné en 2004 et pour lequel elle reçoit l’AVN award du meilleur film un an plus tard, Belladonna tient fermement la queue de cheval de sa partenaire et rapproche son visage d’une gamelle bleue pour l’obliger à laper du lait. L’autre obéit avec plaisir et se conforme par la suite à tous les usages: masturbation énergique, gorge profonde sur gode ceinture, anulingus, etc.
La belle franchit encore un cap en compagnie de Tori Lane dans Belladonna’s Fucking Girls 3 ( 2006). Les ébats entre les deux débutent alors que Belladonna nettoie avec professionnalisme les Water closet. Tori Lane vient l’exciter et elles lèchent bientôt le rebord de la cuvette. Lors de cette formidable séquence, nos hardeuses confondent langue et balayette, cyprine et javel Lacroix, salive et Canard WC gel anti-bactérien.
Et là, dans Heavy Petting, rien de tout cela.
Place aux étreintes tendres, aux doux baisers, à l’effeuillage contrôlé des petits hauts, aux révélations lentes des seins durs et lourds. Point d’insultes, point de performances sportives, point d’agressivité (à part de rares exceptions), point de compétition basée sur la capacité d’accueil des divers orifices, point de sex-toy intimidant. Bref, un autre aspect du lesbianisme.
Alors, cette tendresse annihile-t-elle la subversion?
La pensée commune (et je pense qu’elle a raison) veut que l’acte sexuel majoritaire soit davantage constitué de caresses et de mots doux que de fessées et de jurons. Alors, nous devons bien le reconnaître, Heavy Petting perd tout caractère rebelle. Belladonna rejoint pour un temps la nouvelle mode très intéressante du film porno pour femme. Cette dernière tendance s’illustre dans des œuvres chères et stylisées. Mais surtout, et c’est là la grande nouveauté qui l’éloigne du porno-chic standard, l’acte sexuel en lui-même s’adoucit.
Belladonna arrête pour un temps de choquer et propose un film pour femme qui rend presque superflu le « parental advisory ». Bref, une oeuvre à voir en famille ou entre amies.

La sirène, l’amazone et le gazon maudit.

Notre porno star punkette comprend combien l’entité lesbienne allie violence et douceur. Les deux sont indissociables. Ils sont le Yin et le Yang, le pile et le face, le noir et le blanc, Docteur Jekyll et Mr Hyde, Belle et Sébastien ou la Bête, au choix.
Pour bien comprendre cette théorie, retournons-nous vers deux grands mythes antiques. Nous nous rendrons compte que la figure de la Sirène incarne parfaitement cette lesbienne douce mais dangereuse tandis que le mythe de l’Amazone représenterait davantage l’homosexuelle à la violence frontale de type butch.

Tout près du détroit de Messine - recrutées par les déjà nombreuses mafias locales de Sicile pour repousser les curieux venus du large - les sirènes (qui comme chacun sait, sont toutes des gouines) charment les navigateurs en marinière Jean-Paul Gaultier (c’est le pompon!) à l’aide de leurs chants voluptueux, puis les baisent morts et les dévorent avec avidité. La technologie de l’époque ne permettait pas aux embarcations de prendre une vitesse suffisante pour semer ces tentatrices carnivores. Malheureux qui comme Ulysse n’a pas connu l’hélice.

Du côté de Cappadoce (actuelle Turquie), on rencontre les amazones. Ces guerrières font dans le genre casque lourd (presque à pointe), culture physique et Krav-Maga. Sans oublier les quatre à cinq heures d’entraînement quotidien au tir à l’arc qui leur font vite acquérir un niveau de précision que le futur guignol anglais de la forêt n’a jamais pu atteindre. À ce sujet, la totalité de ces guerrières n’hésitent pas à se couper le sein droit afin qu’il ne les gène pas lors de cet exercice. « Et les gauchères? » interrogent scientifiques et sceptiques tandis que les artistes imaginent la gueule des films pornos de l’époque. Ces jolis brins de femmes aiment également estropier ou tuer les individus mâles qui deviennent leurs esclaves. On trouve ici la différence fondamentale entre sirène et amazone. La femme cogne, cette fois, sans charmer au préalable. Elle ne te séduit plus pour te dévorer. Non. Elle te fout des grands coups de latte en pleine tronche, t’envoie des giclées de mouille acide (seulement les XXX Women) et ensuite, t’arrache les couilles avec ses incisives aiguisées.

Davantage amazone que sirène, plus pirate que conspiratrice libertine, la femme libérée du XXe siècle (selon Belladonna bien sûr) aborde les conflits frontalement. Le mouvement butch reste la manifestation la plus significative de ce nouveau rapport lesbosocial (tu perds ton sang-froid).
Qu’est-ce qu’une butch?
Butch : petit diminutif affectueux du mot anglais « butcher » qui signifie « boucher ».
Voilà, tout est dit. Pour résumer, il s’agit d’une nouvelle société de femmes lesbiennes, costauds, avec le crâne rasé et portant des gros souliers à lacets très épais. En 1968, Valérie Solanas publie son tract SCUM Manifesto qui prône l’émasculation de tous les hommes. Un projet peut-être intéressant d’un point de vue artistique mais heureusement difficilement réalisable. Puis, le 3 juin 1968, elle tente d’assassiner son ancien mentor Andy Warhol. Une balle atteint sa cible mais l’artiste Pop-Art survit. Je me souviens d’un hurluberlu, qui, raillant cette femme étonnante, me tint un jour à peu près ce langage:

« C’est bien les femmes ça! Ça veut couper les glaouis de tous les mecs qu’il y a sur terre et c’est pas foutu de buter, avec un flingue, un artiste garage à bite complètement shooté! »

Soit.
Belladonna arbore parfois un look complètement butch mais, ce qui la différencie de la plupart de ses congénères, c’est qu’elle reste incroyablement désirable, excitante, bandante. Bonne.

Issue d’un milieu familial conservateur, Belladonna tente de percer dans le porno et de devenir la meilleure. Elle y parvient rapidement grâce à ses prouesses physiques extraordinaires. Alors, persuadée que le cinéma X reste avant tout, une affaire de performance, elle s’enferme dans des films durs, rock’n’roll et explorant les profondeurs. Sa conception du cinéma girl-girl est à l’avenant. Pourtant, Heavy Petting montre l’évolution de la réalisatrice/actrice. Il s’agit du film de la maturité. La porno-star s’accorde tout simplement le droit de réaliser une œuvre différente. Lassée de jouer les amazones, Belladonna rêve des créatures aquatiques.
Decors blanc. La sirène nage dans du lait. Irréalité. On pense à la salle immaculée du MUSAC de Léon ou aux murs de Cube² en se disant qu’on accepterait volontiers l’enfermement.

Les trois petits couples de cochonnes.

Heavy Petting se compose de six duos féminins.
J’ai décidé de ne m’intéresser qu’à la moitié des séquences. Je laisse donc volontairement de côté trois scènes, certes de qualité et avec des actrices de classe, mais qui ne reflètent pas très bien les nouvelles expériences cinématographiques de Belladonna. Chassez le naturel, il revient au galop. Les duos Ann Marie Rios/Karlie Montana, Melrose Foxxx/Misty Stone (ne pas confondre avec Missy Stone) et Madison Ivy/Lexi Belle; restent excitants et je vous les recommande. Néanmoins, je préfère me concentrer sur trois chapitres absolument fascinants.

Leah Parker + Mia Presley

Haut les mains! Peau de lapin! La maîtresse en maillot de bain!
En effet, l’espèce d’accoutrement sportswear dont les deux belles sont affublées ressemble étrangement à un maillot de bain. Une fois passée la séquence introductive tout en filtre, on découvre leur véritable couleur: gris. Quelle tristesse.
Pas si sûr! Car, au fur et à mesure de la scène, l’imagination du spectateur invente une histoire et son cœur bat la chamade.
Bon sang mais c’est bien sûr! Ces maillots de bains sont si laids qu’il doit s’agir d’uniformes de baignade d’un vieux collège anglais. L’une de ces deux jeunes bourgeoises, traumatisée dès l’enfance par la mort d’un être cher noyé dans un lac nommé Loch Ness, refuse les exercices de natation pourtant au programme des épreuves de fin d’année. Le professeur, issu de la middle class et ayant réussi à intégrer le staff enseignant à la grande force du poignet (il devait donc, quand même, être un peu branleur), asticote cette petite gamine de riche. Il la force à aller dans l’eau. La belle tente, timidement, d’argumenter. Le ton monte. Elle finit par craquer nerveusement et pleure. Alors, une autre élève vient la consoler et incendie l’homme d’insultes bien trouvées. Dégourdie, la rebelle remet en cause l’autorité naturelle et administrative de l’éminent professeur d’EPS. Elle raccompagne sa camarade aux vestiaires. Dans cette salle immense, elles se retrouvent seules. Les remerciements commencent.

Parker a la peau mate d’une étudiante espagnole gosse de riche en Erasmus à Cambridge. L’épiderme blanc de Mia Presley prend formidablement la lumière et sa frange, so british, termine de la positionner en petite élève britannique type.
Laquelle console l’autre? Je vous laisse répartir les rôles.

Missy Stone + Angelica Raven

Missy Stone en blanc, Angelica Raven en noir.
Début mesuré. Raven est assise, adossée à Stone qui lui déguste la nuque et les oreilles. Missy Stone a un regard bovin et une figure qui la rapproche des personnages reconstitués par Tim Burton. Elle ressemble moins à une poupée qu’à une figurine articulée. Forte de cette beauté étrange, elle vient dominer facilement Angelica Raven qui reste, néanmoins, un formidable exemple de beauté latine italienne. Belladonna met en scène la rencontre entre la coquine charismatique (Missy Stone) et la dame de grande allure (Angelica Raven).
Cette scène brille par sa lenteur. Les deux s’embrassent, se caressent et on a même droit à un langoureux léchage de pinous. Fétichisme des pieds = patte de Belladonna.
Stone finit par coucher la belle brune au bout d’un quart d’heure. Les deux restent encore habillées et notre actrice burtonienne, repérant la bretelle tombante de son vêtement, la replace. Cette fois, nous venons de dépasser les quinze minutes et les superbes seins d’Angelica Raven sont enfin dévoilés. Il faudra attendre encore la vingtième minute (j’ai l’impression de commenter un match de foot) pour que Belladonna ose filmer entièrement le sexe de notre latine.
Missy Stone laisse alors Raven reprendre l’initiative. La brune semble moins sûre et hésite. Alors, en élève douée, elle mime et reproduit les gestes que la lolita de plastique vient de lui enseigner. Mais pendant que Raven (notre dame débutante) doigte sa partenaire, la jeune aguicheuse se caresse le clitoris. Ce détail s’avère être très important car il montre une Missy Stone active tandis que, quelques minutes avant, Angelica Raven, elle, ne bougeait pas et ne souhaitait surtout pas intervenir lors des caresses de son amante. Par ailleurs, Belladonna refusait de filmer la chatte de Raven en gros plan mais n’hésite pas à zoomer sur l’orifice de Stone. Même la réalisatrice respectait la « première fois » de la dame latine.
Tout ceci n’est que mise en scène. Evidemment, Angelica Raven n’est pas moins expérimentée que Missy Stone. Les deux adoptent une posture et incarnent un personnage de fiction. Voilà tout. Belladonna dans sa direction d’acteur et sa réalisation, laisse percevoir des situations. Quel talent!

Georgia Jones + Faye Reagan

Pour comprendre la fièvre de ces étreintes, on ne doit jamais oublier que le couple Faye Reagan/Georgia Jones existe à la ville comme à la scène. Et oui, les deux sont de véritables girlfriends.
Georgia Jones, magnifique petite brunette aux cheveux longs et minuscules seins plantés type Crazy Horse, appartient à cette nouvelle race d’actrices X belles et glaciales, désirables et intimidantes. En l’admirant, on ne peut s’empêcher de penser à Megan Fox. Les plus cultivés, eux, feront l’analogie avec Sasha Grey.
N’ayons peur de rien dans ces dernières lignes et avouons haut et fort une chose: Georgia Jones est presque aussi belle que Sasha Grey; mais ne lui arrive pas à la cheville. Nous expliquerons peut-être un jour pourquoi.
Georgia Jones, si elle ne peut pour l’instant tenir la comparaison avec Sasha, n’en demeure pas moins splendide, intéressante et enivrante. Sa concubine, elle, fait vraiment partie des grandes stars du X; des très, très grandes.

Faye Reagan a longtemps été planquée derrière un pseudonyme (« Faye Valentine ») pour ne pas nuire à son papa politicien et ex-acteur de westerns et séries B ( Je le confesse, ces informations sont fausses. Trop tard. Ils montent déjà jusqu’à mon appartement. Si vous me retrouvez morts: « C.I.A m’a tuer »).
La rouquine ne donne pas dans la performance sexuelle ahurissante, elle ne correspond pas non plus à un canon classique de beauté pornographique. Enfin, nous ne pouvons pas considérer que les amis hauts placés de son père aient encouragé une telle carrière. Le porno encourage le pistonnage, certes, mais bien profond.
J’entends déjà quelqu’un m’opposer l’argument qui voudrait que ce soit le rouille de sa crinière qui propulsa la belle au premier rang. Je réponds que la teinte de ses cheveux contribue seulement à la bizarrerie de sa beauté. Car l’adjectif « étrange » colle à Reagan.
Mon détracteur connaît-il une autre femme ressemblant autant à une maquerelle traditionnelle des saloons américains du XIXe siècle qu’à une gamine tout juste revenue de sa répétition de pom pom girl ?
Connaît-il une autre femme avec des seins aussi superbes que leurs tétons, soufflés à la levure, sont des suçous pour bébés (les anglophones appellent cela « puffy nipples ») ?
A-t-il déjà rencontré une minette aussi jolie et qui pourtant, pendant les fellations, creuse tellement ses joues que son visage se charge d’un rictus spectral et cadavérique?
A-t-il regardé beaucoup de peaux aux taches si densément colorées que même un piercing nasal se retrouve camouflé et passe totalement inaperçu (détail très pratique pour la première rencontre avec les parents d’un éventuel boyfriend ou girlfriend en l’occurrence) ?

Je m’arrête ici. Cette artiste mériterait bien une critique entière de Bonnet & Clyt. Milady ou moi-même nous en chargerons une prochaine fois.

Conclusion

Je ne peux, pour finir, que vous recommander une nouvelle fois ce petit bijou pornographique. Une dernière chose, rappelez-vous ce mot bien trouvé de ce cher Pierre Doris qui disait:

« Il y a les filles comme il faut et les filles comme il en faut. »


Bien cordialement

Le Duc de Jom Puan